Ecoutez les réponses de Nicolas Lebourg
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1- Le FN aura-t-il un jour à sa tête quelqu'un qui ne fait pas partie de la famille Le Pen ?
Nicolas Lebourg : Pour l'instant, la marque Le Pen est indispensable à l'homogénéité du parti et à son électorat. Toutes les tentatives de construction d'un autre parti ou bien d'un appareil dépendant des cadres du Front national ont échoué. Historiquement, la figure du tribun est indispensable à l'alchimie du national populisme.
2 - Le FN a-t-il changé ou évolué ?
Nicolas Lebourg : Vaste question. Ses fondamentaux demeurent ceux du national-populisme qui existe depuis 130 ans dans notre vie politique : dénonciation des élites, apologie du peuple sain, etc. En revanche, il est extrêmement plastique au niveau du programme (économie, etc.). Il s'agit plus d'une vision du monde que d'une doctrine.
3 - Quelle sera selon vous la prochaine étape que devra franchir Marine Le Pen pour se crédibiliser ?
Nicolas Lebourg : C'est la même question depuis quarante ans, avec la même réponse, pour se crédibiliser, il faut des notables locaux. Ceux-ci sont nécessaires, paradoxalement, pour se présidentialiser. Le Parti communiste peut faire figure d'exemple avec, longtemps, ses municipalités et son tribun charismatique. Par ailleurs, les élections locales rendent plus aisées des alliances à la base avec la droite.
4 - Quelle est la place du FN aujourd'hui? Est-il audible? A-t-il des réponses sérieuses ?
Nicolas Lebourg : Dans la cacophonie actuelle des droites, le Front national a le mérite d'avoir un discours global : une souveraineté nationale, identitaire et sociale. Cependant, au vu des enquêtes d'opinion, la préférence nationale est un thème qui motive son électorat mais qui ne parvient pas encore à être crédible pour l'essentiel de nos concitoyens.
5 - Le FN ne devrait-il pas quitter ses idées anti-européennes pour avoir de vraies chances d'arriver au pouvoir ?
Nicolas Lebourg : Au contraire, sa force est de représenter un discours cohérent de défense de tous les aspects de la souveraineté. Sur le marché politique, il est le seul à occuper ce créneau.
6 - Existe-t-il des circonstances politiques qui pourraient pousser la droite traditionnelle à faire alliance avec le FN ?
Nicolas Lebourg : Le but de la politique, c'est le pouvoir. Le reste est littérature. Il y aura une forte tentation de retrouver le scénario de 1988 où les droites ont tenté d'imposer localement à leur appareil national des alliances avec le FN. Enfin, il est possible qu'une partie de l'électorat de droite aille voter FN pour "punir" la droite. Cela ouvre une fenêtre.
7 - Quelle est la principale différence entre le FN version Jean-Marie et le FN version Marine ?
Nicolas Lebourg : La grande différence entre les deux, c'est le refus de revenir sur ce qui a trait à la seconde guerre mondiale. Mais il faut voir que, comme d'habitude, le FN ne fait ainsi que retranscrire une évolution sociale. Les polémiques mémorielles aujourd'hui ont surtout trait à la guerre d'Algérie, à la colonisation. L'ensemble de la société française est sortie de l'obsession de Vichy.
8 - La crise frappant actuellement le parti les Républicains a-t-elle des conséquences directes pour le FN ?
Nicolas Lebourg : La part dure de la droite du parti les Républicains pourrait être tentée d'aller chercher alliance avec le FN.
9 - Peut-on toujours qualifier le FN de parti d'extrême droite? Et pourquoi ?
Nicolas Lebourg : Extrême droite est un terme que les gens d'extrême droite ont toujours refusé. Il s'est imposé dans le débat public français après 1917. Le courant auquel se rattachent les Le Pen existe idéologiquement depuis les années 1880. Le problème est que l'on fait d'un segment structurel de la vie politique française un marqueur moral. Cela n'a aucun rapport. Le FN demeure en toute chose un parti qui correspond à la définition historique de l'extrême droite. Ni plus ni moins.
lemonde.fr
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