Le Rwanda, un pays d'Afrique centrale coincé entre la république démocratique du Congo, la Tanzanie, le Burundi et l'Ouganda. Ce petit pays est l'un des plus densément peuplé au monde, avec ses presque 10 millions d'habitants pour une superficie d'un peu plus de 25 mille km. C'est une population divisée avec deux ethnies principales : les Hutus et les Tutsis. Mais peut-on vraiment parler d' « ethnies » ?
Les Hutus et les Tutsis ont en effet tellement de choses en commun qu'il est difficile, voire impossible, de les considérer en tant qu'ethnies : ils vivent sur un même territoire, parlent une même langue – le kinyarwanda –, pratiquent une même religion et partagent une culture identique. Ce ne sont pas non plus des castes puisque qu'aucune hiérarchie de la pureté ni endogamie ne les séparent. L'idée de classe ne correspond pas davantage avec une diversité interne certaine, tant sur le plan social que géographique. Hutu et Tutsi ne constituent par conséquent ni des races ni des ethnies, ni des castes ni des classes ; ce n'est qu'une identification parmi d’autres.
Pourtant, au début du XX ème siècle, l'arrivée des colonisateurs européens, allemands puis belges, va bouleverser l'ordre établi. En effet, cette domination coloniale s'accompagne de théories raciales évidentes et l'élite Tutsi, alors considérée comme race supérieure, va être favorisée, au détriment des Hutus.
La distinction des races est officialisée en 1931 tandis que la mention raciale apparaît sur les cartes d'identité. Quelques dizaines d'années auront suffit pour creuser le fossé racial qui entrainera le génocide de 1994.
Si l'élite Tutsi est au début favorisée, son désir d'indépendance, de plus en plus fort, incite en 1959 les Belges a renverser leur alliance au profit des Hutus. Grégoire Kayibanda devient Président de la République en 1961, et les contestations Tutsis quant au régime mis en place vont entraîner de violentes émeutes, fermement réprimées par des massacres et des pogroms (assauts avec pillages et meurtres d'une partie de la population contre une autre).
Des milliers de Tutsis trouvent refuge dans les pays voisins et Juvénal Habyarimana, profitant des troubles qui agitent le pays, renverse Kayibanda en 1973, avant de fonder un nouveau parti, le Mouvement Révolutionnaire National pour le Développement (MRND), soutenu par la France.
De leur côté, les exilés Tutsis se regroupent en Ouganda et mettent en place le Front Patriotique Rwandais (FPR). Ils tentent en octobre 1990 d'entrer en force au Rwanda. C'est la guerre civile. Les massacres et exécutions de Tutsis se multiplient tandis que la France, ignorant les prémices du génocide, continue de soutenir le régime de Habyarimana.
La propagande anti-Tutsi ne cesse d'augmenter et le 6 avril 1994, Habyarimana meurt dans un attentat avec le président du Burundi. C'est l'évènement déclencheur. Les massacres s'enchaînent aussitôt – guidés par la Radio Télévision Libre de Mille Collines (RTLM) – tant contre les opposants Hutu que contre les Tutsis et l'on dénombre plus de 800 000 morts en seulement trois mois.
De la même façon qu'après la Shoah lors de la Seconde Guerre Mondiale, de nombreux procès ont lieu par la suite pour « crime contre l'humanité » ou encore « complicité de génocide ». Le génocide s'étant déroulé durant une guerre civile et la guerre d'indépendance, certain nient purement et simplement son existence alors que d'autres affirment qu'il s'agit d'un « double » génocide, qui aurait touché tant les Tutsis que les Hutus. Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR), mis en place fin 1994 par l'ONU pour juger les personnes responsables d'actes de génocide, déclare finalement que le génocide n'a plus besoin d'être prouvé.
Richard Tribouilloy, professeur d'histoire-géographie